Davos: Comment une station de ski devient le centre du monde (pendant une semaine).
Pour réussir, Davos bénéficiait de plusieurs atouts: une hôtellerie haut de gamme, une clientèle comptant déjà de nombreux décideurs mondiaux et une situation géographique idéale, à la fois isolée pour la sécurité (une seule route d'accès) et centrale. Moi, ça me rappelle ma station préférée...
Alors bien entendu, il n'y aura pas un second Davos, mais cet exemple est là pour nous rappeler que:
-Un événement majeur dynamise une station, et n'est pas forcément culturel ou festif.
-Avec de l'ambition, tout est possible...
(légende photo: manifestation de bonhommes de neige à Davos pour alerter sur l'urgence climatique)
Voici un article paru dans Le Temps qui date un peu (ci-dessous), mais qui résume bien l'impact du FEM sur la station de Davos.
Davos s'apprête à croire qu'elle est la capitale du monde
Hier matin, le thermomètre de Davos-Platz indiquait fièrement -24 degrés. Le ciel était limpide, l'air sec et mordant, alors que le soleil quittait les cimes pour réchauffer la station grisonne. Le temps se prête à un engourdissement certain, et pourtant un diplomate fait crisser les pneus de sa voiture sur la promenade enneigée, la rue chic de la ville. Effervescence? Davos va vivre dès jeudi l'événement phare de sa saison, le World Economic Forum (WEF), et la ville de 13 000 habitants connaît pour la trentième fois ce relent d'adrénaline qui lui donne quelques jours durant des airs de capitale mondiale. «La possibilité de saluer Nelson Mandela, de sentir sa chaleur communicative, de penser au destin de cet homme, c'était Noël et Pâques tout à la fois», s'extasie rétrospectivement Andrea Reber, responsable du marketing de l'hôtel Belvédère.
Sur le parvis de ce palace un brin vieillot, des gardes du corps vous toisent de cet air qui fait semblant de ne rien voir. Une délégation du tiers-monde s'inquiète qu'on a bien respecté les volontés de son grand patron attendu pour jeudi. L'électricien justement vient poser une vidéo. Ce ne sont pas les hôtes qui choisissent leur hôtel, mais Global Event Management (GEM), une société basée à Paris et Genève chargée de gérer l'hébergement de tous les symposiums du WEF à travers le monde. De même, GEM choisit les repas des sessions agendées dans les différents hôtels. Le Belvédère s'apprête à servir 1000 repas par soir. Et pour l'un des grands banquets de 450 convives, 600 homards et 4,5 kilos de caviar sont d'ores et déjà commandés. A ce rythme, le palace réalise 18% de son chiffre d'affaires pendant la seule semaine du forum.
A quelques minutes de là, au Palais des congrès, centre névralgique de la manifestation, les employés du World Economic Forum règlent essentiellement des problèmes d'infrastructure et de logistique. «Certains leaders annoncés sont remplacés par d'autres, confie un membre du WEF, ce qui modifie le programme des rencontres de façon substantielle, sans parler des problèmes d'hébergement.» Effectivement, les hôtels affichent complet des mois à l'avance: impossible de trouver la moindre chambre des kilomètres à la ronde, au point que certains en profitent et proposent des logements à des prix surfaits. «Il y a toujours des moutons noirs, relativise Bruno Gerber, directeur de l'Office du tourisme. Mais nous intervenons: en représailles, nous ne vendons plus ces établissements dans notre offre.»
Bruno Gerber préfère évidemment évoquer l'extraordinaire publicité que procure le forum à la ville de Davos: 3500 personnes du monde entier se retrouvent dans la station, dont 650 journalistes accrédités et, parmi eux, 40 télévisions. «Cela nous a permis de combler outre-mer notre déficit d'image par rapport à St-Moritz», analyse le directeur. Pourtant, les habitués du WEF reviennent peu entre les forums. «C'est égal, le nom de Davos circule et nous amène beaucoup d'autres personnes», poursuit notre interlocuteur.
En fait, la commune doit apprendre à gérer le forum dont l'impact prend parfois des dimensions encombrantes par rapport aux revenus qu'il génère. Ainsi, les hôtes du WEF ne représentent qu'un cinquième de tous les touristes présents cette semaine dans la station. Les mesures de sécurité entourant les déplacements des chefs d'Etat perturbent la mobilité des autres convives.
Le forum n'est pas non plus la poule aux œufs d'or: «Les hôtes sont enfermés dans leur circuit, on ne les voit plus», déplore la tenancière du Mercure, qui avoue «6 à 10%» de chiffre d'affaires en plus à cette période. Quand même. Chez Bucherer, où l'on prend soin «de proposer une plus vaste collection», on vend bien, mais moins qu'entre Noël et Nouvel An. «Nous avons chaque année, avant le WEF, un congrès de pharmaciens: ils sont aussi nombreux et dépensent beaucoup plus», note l'air de rien le directeur de Davos Tourisme.
Et puis il y a les couacs: l'année dernière, murmure-t-on en ville, l'ambassadeur d'un pays d'Amérique centrale a offert un banquet au restaurant Time Out pour 65 000 francs. C'est finalement le département de Monsieur Villiger qui a passé à la caisse…
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