Un hiver sans neige sonnerait le glas du ski industriel.

A deux mois de l'ouverture, l'angoisse de l'enneigement va faire son grand retour. A ce propos voilà un article paru dans "Le Temps" (Suisse) en janvier 2017, mais toujours d'actualité. L'enneigement naturel va devenir de plus en plus aléatoire, c'est inévitable. Croire que nous serons miraculeusement épargnés par ce bouleversement n'est pas raisonnable. On peut jouer les autruches, ou commencer à s'y préparer. Nous avons une génération pour cela. Mais cela ne signifie pas forcément la fin du tourisme en montagne. Paradoxalement, le réchauffement, qui nous rationnera la neige, est aussi un atout pour la fraiche et pure montagne. Reste à donner envie à nos visiteurs de faire autre chose que du ski, d'abord un ou deux jours par semaine de vacances. Pour réussir cette transition -cette révolution- du passage des "vacances au ski" vers des vacances "à la montagne en hiver", il va falloir se mettre au boulot des demain et faire preuve d'imagination.
Début de l'article du Temps:
Le réchauffement climatique pèse de plus en plus sur les activités humaines, jusque chez nous. En Suisse, la répétition d’hivers sans neige contraint une industrie entière à lutter pour sa survie. Le tourisme des sports d’hiver, déjà étranglé par le franc fort, s’apprête à traverser une saison «de tous les dangers», selon l’expression du directeur de Téléverbier. Un récent et sévère commentaire de la NZZ évoquait le risque que les milliards investis dans les remontées mécaniques se transforment bientôt en une «montagne de capital mort». Le manque de neige n’est pas seulement un désagrément pour les skieurs, il risque de devenir un problème économique de première importance pour la Suisse. Si elles atteignent un point critique aujourd’hui, ces difficultés ne sont pas nouvelles. La Confédération a déjà averti qu’il faudrait cesser d’investir dans le ski à moyenne et basse altitude. Le problème est que personne ne veut l’écouter. Un puissant lobby des montagnes milite pour la poursuite de lourds investissements dans le ski industriel. Comme il sera de moins en moins rentable, il faut s’attendre à des demandes de subventions qui pourraient se monter en milliards de francs ces prochaines années.
Le parlement et le Conseil fédéral devront y résister. Des aides à la transition, pour éviter la faillite de nombreuses stations, seront sans doute nécessaires. Mais des subventions n’auront de sens que si elles préparent l’avenir: un tourisme alpin où le ski tel que nous le connaissons ne jouera plus qu’un rôle secondaire.
Le potentiel de demande pour ce «tourisme doux» existe. Une bonne partie des Suisses a déjà renoncé à skier – ou ne l’a jamais fait pour des raisons financières. Une autre préfère la montagne pour sa beauté et pour simplement la parcourir à pied. Ce sont ces clientèles qu’il faudra choyer, au lieu d’investir dans des installations disgracieuses (canons à neige, bassins d’accumulation, parkings surdimensionnés) que le réchauffement climatique rendra bientôt obsolètes.
Le tourisme doux rapportera, en tout cas dans un premier temps, moins que l’industrie actuelle du ski. Le rendre profitable demandera l’avènement d’une nouvelle génération d’entrepreneurs, qui émerge mais reste pour l’instant marginale. Le changement imposera aussi une révolution mentale: qu’on cesse de vendre la Suisse comme une destination de raclette et de neige, suppliait, dans nos colonnes, le chef étoilé Benoît Violier (décédé en janvier 2016). Nul doute qu'un nouvel hiver sans neige accélérerai la prise de conscience.
Le Temps 01/2017

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